Politique
[Édito] Ce qu’il faut vraiment reprocher à Amélie Oudéa-Castéra
La nouvelle ministre de l’Éducation nationale est sous le feu des critiques après avoir déclaré que ses enfants venaient d’une école privée. Mais là n’est pas le plus gênant.
Décidément, le gouvernement Attal I ne se sera pas fait sans histoire. À chaque jour, sa polémique, la première à ouvrir le bal étant la nouvelle ministre de l’Éducation, AOC pour Amélie Oudéa-Castéra.
La grande cause tombe à l’eau
Les grandes causes, on ne les compte plus. Pourtant, alors que Gabriel Attal sortait de la rue de Grenelle, il paraissait évident qu’il ne laisserait pas tomber le sujet grâce auquel sa popularité s’était envolée.
Si l’idée d’un gouvernement resserré était belle, comment diable peut-on justifier le fait que, d’un côté l’école soit « une priorité absolue » et de l’autre, nommer une ministre de l’Éducation nationale, des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques ? Alors que le plus grand évènement sportif du monde se déroule chez nous dans six mois et que son organisation laisse présager des pires désastres, confier au même ministère tant d’affaires laisse penser qu’entre les JO et l’école, il faudra faire un choix. L’ancienne joueuse de tennis et présidente de la FFT n’a d’ailleurs jamais montré la moindre connaissance ou compétence en termes d’éducation par le passé, mais qu’à cela ne tienne, son prédécesseur Gabriel Attal non plus.
Conscience de classe
Pourtant, ce n’est pas le cumul de deux ministères cruciaux qui est reproché à la nouvelle ministre. Non, loin de là, c’est plutôt la scolarité de ses enfants au très prestigieux lycée St Stanislas à Paris qui insupporte la gauche et réveille la droite.
« AOC » l’a publiquement admis après hésitations : oui, elle a bien scolarisé ses enfants dans le privé, c’était à cause : « des paquets d’heures qui n’étaient pas sérieusement remplacées ». Le mensonge est téméraire, d’autant plus que son fils aîné n’a vécu dans le public que six mois en petite section de maternelle. La version est d’autant plus fragilisée que le témoignage de la maîtresse a été retrouvée : jamais elle n’a été malade durant ses six mois, et si tel avait été le cas, elle aurait été remplacée. Eh oui, Littré, ce n’est pas non plus n’importe quelle maternelle.
Plus tard, une nouvelle excuse arrive : il s’agit en fait d’une question de saut de classe. Le petit Oudéa-Castéra n’aurait en effet pas eu le droit de passer en moyenne section en milieu d’année, il fallait donc le changer d’école pour que cela se fasse. La version est démentie par la ministre, maintenue par Littré. La gauche mord à l’appât : AOC a menti et l’école publique est parfaite. Vingt-quatre heures après son arrivée à Grenelle, premier mensonge, on dirait presque un gouvernement centriste.
La vraie raison n’est pourtant pas là : si Amélie Oudéa-Castéra a placé ses enfants dans l’école privée, c’est parce qu’elle en avait les moyens. Largement les moyens : l’amie du PDG de Carrefour Alexandre Bompard (dont la femme est au gouvernement) touchait 1,4 million d’euros par an dans le conseil d’administration de l’entreprise avant qu’elle ne divise généreusement son salaire par trois pour atteindre les 582 000 euros annuels (sans compter ses dividendes chez Carrefour).
Alors, il est établi qu’entre elle et son mari ex-PDG de la Société Générale, puis aujourd’hui du géant pharmaceutique Sanofi, la famille ne manque pas d’argent. Ni de relations d’ailleurs, car AOC est la fille de Dominique Duhamel, et donc la nièce du couple de journalistes de BFMTV proche du pouvoir Alain Duhamel et Nathalie Saint-Cricq.
Pourquoi Oudéa-Castéra a menti
Le mensonge de la ministre ne se situe néanmoins pas tant du côté de la question du saut de classe que de celui de la raison réelle pour laquelle ses enfants n’étaient pas dans le public. Mettre ses enfants dans une école privée était évidemment largement à la portée d’AOC. Pourtant, des familles moins aisées, elles, se plient en quatre pour y parvenir. La vraie question que devrait se poser la gauche n’est d’ailleurs pas pourquoi la ministre de l’Éducation a scolarisé ses enfants dans le privé, mais pourquoi tout le monde fuit le public.
Quand on a des enfants, on souhaite généralement le meilleur pour eux, pas les vertus de laïcité et de mixité sociale. Or, en France, l’enseignement privé est largement meilleur, sauf exceptions, que le public. Pourquoi ? C’est bien cela qu’Amélie Oudéa-Castéra n’a pas osé dire. C’est là son grand mensonge.
Le non-remplacement des professeurs ou l’impossibilité du saut de classe ne sont que des problèmes mineurs. L’enseignement public, miné par l’immigration, la chute vertigineuse du niveau scolaire, le manque cruel de discipline par une idéologie pédagogiste et la baisse du niveau des professeurs, n’attire plus qu’à Louis Le Grand ou Henri IV. En fait, ce qu’AOC a refusé de dire, c’est que par la faute d’Emmanuel Macron et de ses prédécesseurs pour qui elle travaille aujourd’hui, l’école publique est en lambeaux. Alors effectivement, pas sûr que cette enfant de l’élite bourgeoise parisienne y comprenne grand-chose, elle qui l’a toujours fuie.
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