[Eric Naulleau] NFP : sous le plus grand chapiteau du monde

On serait tenté d’écrire que le spectacle offert à l’Assemblée nationale par les élus du Nouveau Front Populaire (NFP) fait penser à La Monstrueuse Parade (Freaks dans la version originale), le film culte de Tod Browning sorti en 1932. Rien ne serait pourtant plus injurieux, car les authentiques phénomènes de cirque à l’affiche dans ce chef-d’œuvre du cinéma mondial (femme à barbe, sœurs siamoises, homme-tronc, hermaphrodite…) exercent du moins leur métier avec compétence et se révèlent des êtres attachants, liés les uns aux autres par un code d’honneur et le respect de certaines hautes valeurs.

La cour des Miracles, où marginaux et truands de tout poil trouvaient refuge au Moyen Âge, en donne sans doute une image plus juste. Les députés d’extrême gauche partagent avec les tire-goussets d’autrefois le même vocabulaire (« Ferme ta gueule, toi ! On va s’occuper de toi, vas-y dégage » lance publiquement Thomas Portes à l’adresse d’un collègue du Rassemblement national), les mêmes procédés (Sébastien Delogu essayant d’intimider physiquement le cadet du Palais-Bourbon lors d’un vote), la même gestuelle (Sandrine Rousseau décochant un bras d’honneur à l’intention de l’ensemble du groupe RN) et le même niveau d’éducation (Sébastien Delogu, encore lui, ânonnant un texte dont il ne comprend pas un traître mot pendant une session de la commission des finances).

À force d’appliquer les consignes de « bordelisation » données par Jean-Luc Mélenchon, difficile de dire si, dans ce passage de Notre-Dame de Paris, Victor Hugo évoque la récente activité parlementaire sur les bancs insoumis ou la cour des Miracles au XVe siècle : « Tout cela allait, venait, criait. On entendait des rires aigus, des voix de femmes. Les mains, les têtes de cette foule, noires sur le fond lumineux, y découpaient mille gestes bizarres. (…) C’était comme un nouveau monde, inconnu, inouï, difforme, reptile, fourmillant, fantastique. »