Société
Fin de vie : ce que prévoit le texte qui revient à l’Assemblée

Cette approche tranche nettement avec celle du projet initial, présenté avant la dissolution de l’Assemblée de juin dernier. Celui-ci envisageait une réforme globale, intégrant à la fois l’amélioration des soins palliatifs et la légalisation de l’euthanasie, sans dissocier les deux volets.
Or, cette fusion posait un problème de fond : en liant ces deux aspects, les parlementaires favorables au développement des soins palliatifs mais opposés à l’euthanasie se retrouvaient piégés — contraints de rejeter un texte qu’ils soutenaient en partie.
La nouvelle méthode vise donc à clarifier les positions et à permettre un débat plus lisible. Elle offre à chaque camp la possibilité d’exprimer des votes cohérents, sans devoir faire des concessions.
Deux visions opposées de la fin de vie
Pourtant, ce changement de méthode n’a pas fait l’unanimité parmi les parlementaires. Tout simplement parce que deux conceptions radicalement différentes de la fin de vie s’affrontent. D’un côté, certains estiment qu’il est impératif de garantir un accès équitable aux soins palliatifs avant d’envisager toute légalisation de l’euthanasie. Ces soins, destinés aux personnes atteintes de maladies graves ou en phase terminale, visent à soulager la douleur et à préserver la qualité de vie des patients.
Mais dans les faits, le système actuel est loin d’être à la hauteur : près de 50 % des patients n’ont pas accès à des soins palliatifs adaptés, et 21 départements en sont totalement dépourvus. Le gouvernement propose donc un plan de financement sur dix ans pour combler ces lacunes.
L’aide à mourir, un droit revendiqué
De l’autre côté, certains considèrent l’aide médicale à mourir comme un droit fondamental, voire comme une forme de soin à part entière — l’ultime geste de compassion, permettant d’abréger des souffrances insoutenables.
C’est notamment la position défendue par l’ancienne Première ministre Élisabeth Borne et la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet. Dans une tribune publiée le 27 janvier dans Le Parisien, elles expriment leur opposition à la dissociation entre soins palliatifs et aide à mourir. « Dissocier les soins palliatifs de l’aide médicalisée active à mourir serait une erreur », affirme Yaël Braun-Pivet, qui considère cette aide comme « une forme ultime de soin palliatif, dans la continuité des soins déjà prodigués ».
Une réforme plus lisible, mais loin de rassurer
Malgré ces réserves, le gouvernement a maintenu le choix de scinder les deux volets de la réforme. Deux textes distincts seront ainsi examinés demain en commission des affaires sociales. Un choix assumé, mais qui ne lève pas toutes les inquiétudes, en particulier sur le contenu du projet de loi relatif à « l’aide à mourir ».
Le texte soumis à la discussion est une reprise de la dernière version débattue avant la dissolution du Parlement, en juin 2024. Il précise que les patients souhaitant recourir à l’aide médicale à mourir devront présenter une « affection grave et incurable, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale ».
Or, cette formulation marque un assouplissement notable par rapport à la première version du projet, qui conditionnait l’accès à une aide active à mourir à un « diagnostic vital engagé à court ou moyen terme ». Mais qu’entend-on exactement par « pronostic vital engagé » ou « phase avancée » ? À combien de temps cela correspond-il ? Autant de zones d’ombre qui pourraient ouvrir la voie à des interprétations divergentes.
Le projet prévoit aussi que la décision sur la fin de vie soit prise par un médecin, seul, dans un délai maximal de quinze jours. Une fois cette décision rendue, le patient disposerait de quarante-huit heures pour confirmer sa demande d’administration d’une substance létale — un délai qui pourrait être raccourci en fonction de son état de santé.
Un texte à suivre de près
Cette procédure rapide alimente les critiques déjà formulées contre le texte. Car au-delà du découpage du calendrier parlementaire, c’est bien le contenu du projet sur « l’aide à mourir » qui concentre l’essentiel des inquiétudes. En scindant les débats, le gouvernement espère apaiser les tensions et permettre une adoption plus lisible de sa proposition de loi, mais la légalisation de l’euthanasie continue de soulever des questions de fond. À la veille d’un débat aussi sensible, c’est moins le calendrier législatif que la solidité des garanties encadrant ce droit nouveau qui sera scrutée de près.

Aucun commentaire
Vous devez être connecté pour commenter.
Chargement