Société
David Arveiller : « le quasi-monopole de la gauche dans les médias est, en France, un véritable souci. »
David Arveiller, animateur de la chaîne Reconquête! sur YouTube et militant de ce même parti, a répondu à nos questions sur le potentiel conflit d’intérêts qu’il y a entre être journaliste et militant politique.
Vous êtes adhérent et animateur de la chaîne Reconquête! ainsi que rédacteur à Causeur, n’y voyez-vous pas un conflit d’intérêts ?
Hormis pendant mon année de service militaire au SIRPA (Service d’Information et de RP des Armées, NDLR) lorsque j’avais 25 ans, je n’ai jamais été journaliste… mais comédien pendant près de quinze ans et depuis 2016, coach/ formateur indépendant en communication orale et prise de parole. D’autre part, les opinions politiques n’empêchent personne -y compris les journalistes, dans une démocratie libérale, du moins- d’être publié, que ce soit en ligne ou dans la presse papier.
Le lecteur seul décide de la pertinence du propos et donc du sort de l’auteur de ces publications (davantage en fonction de la qualité de son travail que de ses opinions, me semble-t-il).
Même non journaliste, le militant zemmourien de l’avant-première heure que je suis, assume publiquement son soutien. J’aurais d’ailleurs du mal à faire autrement, dans la mesure où j’ai effectivement décidé de créer cette chaîne d’interviews YouTube sous pavillon Les amis d’Éric Zemmour dès le début 2021, aux fins d’encourager puis d’accompagner Éric Zemmour dans sa candidature à l’élection présidentielle (candidature qu’il n’avait alors peut-être pas encore complètement décidée, ou du moins pas décidé d’annoncer). Peu, y compris parmi mes premiers invités, croyaient d’ailleurs vraiment à ladite candidature, ce qui n’empêchait pas la rumeur d’enfler et les premières audiences de la chaîne de grimper rapidement. Et ce, tant cette possibilité de candidature créait la surprise et faisait renaître un espoir chez de nombreux Français, à juste titre désespérés par le petit jeu politicien de ces dernières décennies.
Pour ma part, j’étais non seulement convaincu depuis de (très) nombreuses années de sa nécessité pour le pays, mais il me semblait qu’Éric Zemmour avait envoyé ça et là quelques signaux suffisamment clairs -en public et/ ou en privé- pour pouvoir y croire et se donner du mal pour le faire savoir, avant qu’il ne décide éventuellement d’en parler lui-même. Pour ne rien cacher à vos lecteurs, la direction de ce qui n’était pas encore le mouvement Reconquête! avait accepté que j’utilise le nom de l’association pour ma chaîne, m’encourageant tacitement (supposais-je) à encourager ladite candidature.
Pour autant, j’étais libre de mes invités tout autant que du contenu des interviews… et le suis d’ailleurs resté depuis, à ma grande surprise je dois dire. En effet, au lendemain du congrès fondateur de Villepinte et l’annonce de notre nouveau mouvement politique (début 2022) la direction de la stratégie d’Éric Zemmour décida de mettre fin aux AEZ (« Amis d’Éric Zemmour », NDLR) et ma chaîne devint tout naturellement le média « officiel » du mouvement (même si entretemps, Éric Zemmour avait lancé son propre canal sur YouTube).
Votre chaîne compte un large panel d’invités, membres de R! ou non, in fine, le but est de diffuser la doctrine du parti ou de former les consciences de vos téléspectateurs ?
Éric Zemmour s’est présenté au suffrage des Français l’an dernier avec l’ambition de réveiller nos concitoyens d’une forme de léthargie, de défaitisme et de déculturation dans lesquels les ont plongés depuis trop longtemps leurs dirigeants, avec la complicité de médias politiquement corrects, c’est-à-dire lâches et conformistes. En tant que militants patriotes, notre tâche est claire, noble et surtout immense, tant la sédimentation des multiples couches de crasse est ancienne dans l’hexagone, ce territoire qu’on a même parfois du mal à appeler France tant il a changé en une seule génération.
Comme je vous le disais précédemment, aucun dirigeant de R! ne m’a jamais donné de consigne ou refusé de publier une interview sur la chaîne, laquelle est donc paradoxalement devenu media officiel tout en gardant une ligne éditoriale libre. Il est évident que gagner de nouveaux abonnés et convertir à nos idées -simples mais grandes- le plus de Français possible pour progresser en termes électoraux est primordial. Peut-on pour autant parler de diffusion de doctrine? La seule doctrine d’Éric Zemmour est l’amour de la Patrie et donc la reconquête d’une indépendance et d’une identité nationale malmenées, voire perdues. C’est là l’alpha et l’oméga de son mouvement, de notre mouvement. C’est aussi probablement ce qui distingue Reconquête! des partis traditionnels de la droite dite nationale, RN en tête. On l’a vu lors de la dernière présidentielle, où le thème du pouvoir d’achat a seul propulsé Marine au second tour de l’élection. Notre doctrine donc, simple et protéiforme à la fois, je la fais bien entendu mienne et elle constitue le fil rouge des 34 interviews que j’aurai eu le plaisir de mener pour l’instant sur la chaîne, de Bigot à Naulleau, de Messiha à Poisson, de Bercoff à Lévy, de Rieu à Lafont, de Peltier à Bay et Rigault… et jusqu’à Marion Maréchal.
Si des consciences, notamment de jeunes gens, peuvent être formées par lesdites interviews, je ne m’en plaindrai pas et en serai même fort heureux, tant Éric Zemmour a lui-même formé une ou même deux générations de Français. Je me souviens de Jordan Bardella, revendiquant fièrement – pas si longtemps avant son élection à la tête du RN- son statut de « Zemmour boy » (en bon français).
Ces mêmes téléspectateurs vous qualifient d’être, dans vos questions & interviews, plus à droite que votre parti lui-même. Pouvez vous commenter cette analyse émanant de votre audience ?
Vous avez l’oeil. J’ai en effet lu cette affirmation trois ou quatre fois… sur les milliers de commentaires publiés en marge des interviews. Ayant voté Mélenchon jusqu’en 2012 (du temps où celui-ci reprochait par exemple aux femmes musulmanes voilées de « s’autostigmatiser », (Mélenchon 1 donc comme dirait Éric Zemmour !) ce type de commentaires me fait sourire. Cela dit, l’abonné est avant tout un citoyen libre de penser et d’écrire, du moins s’il ne tombe pas dans l’insulte.
Notre chaîne -à l’image du mouvement lui-même- n’est pas sectaire. Ce qui compte à mes yeux est que les commentateurs occasionnels, même les plus critiques, apprécient la qualité du media et restent abonnés. Pour ce qui est plus généralement de la droite nationale aujourd’hui, il ressort de toutes les études et enquêtes d’opinion que beaucoup de Français pensent enfin comme Zemmour, que ce soit sur l’islam, l’immigration, l’insécurité… ou même la désindustrialisation et la perte d’indépendance de notre pays.
La question que je me pose est donc simple : pourquoi ne votent-ils pas massivement pour nous ? Il est vrai que 2,5 millions de voix pour une première candidature, arrivée en 4e position du premier tour de l’élection présidentielle, est un score plus qu’encourageant. La nomination de Marion -élue à 22 ans, une des plus jeune députés de l’histoire de France- à la tête de la liste R! pour les prochaines européennes est également un signe encourageant. Que je sois plus à droite qu’elle m’étonnerait grandement et cela serait-il que ce n’est pas le sujet. Si vous jugez que mon positionnement politique précis intéresse malgré tout votre lectorat, sachez que je lui ai proposé de faire figurer mon nom sur sa liste et également mettre mes interviews au service de sa campagne. Si, bien entendu, notre vice-présidente et tête de liste le juge utile pour la séquence électorale qui s’ouvre… et donc pour le Mouvement !
À droite, doit-on assumer ses accointances politiques en tant que journaliste ? À gauche, beaucoup de militants journalistes exercent cela depuis bien longtemps.
Il est vrai que le quasi-monopole de la gauche dans les médias est en France un véritable souci. Éric Zemmour a d’ailleurs longtemps rappelé un sondage emblématique, réalisé dans les principales écoles de journalisme lors de la mémorable élection présidentielle de 2002. La quasi totalité des élèves y affirmait vouloir (ou avoir, je ne me souviens plus) voter(é) Jospin, très peu Chirac… et aucun Le Pen, pourtant arrivé devant Jospin à l’issue du premier tour. La fameuse reproduction bourdieusienne des élites n’est donc pas, dans cette profession, prête de s’arrêter en France.
Pour autant, quelques rayons de lumière commencent d’exister depuis quelques années, en grande partie d’ailleurs grâce à Bolloré (Valeurs actuelles, CNews ou JDD depuis peu), mais pas seulement. Si les traditionnels Minute, Rivarol ou Le Crapouillot ont disparu ou presque, Causeur évidemment (je ne suis pas objectif), Sud Radio, Livre Noir bien sûr ou L’Incorrect sont bien vivants et assument leur positionnement politique de droite et même pour certains de droite nationale. A gauche enfin, pour élargir la question, Front Populaire d’Onfray ou encore de fortes individualités comme Naulleau font entendre une voix différente, résolument opposée à la gauche LFI / NUPES pour l’instant toute-puissante dans les urnes.
Tous sont certes ostracisés, critiqués, insultés (y compris par des ministres aux Affaires…) mais ils tiennent leur cap et entrent au forceps dans les foyers français. Nul doute donc que cette belle obstination finira par payer. Ces valeureux journalistes et chroniqueurs, tous patriotes à leur manière, pourront en tout cas continuer de se regarder dans une glace et surtout regarder leurs enfants dans les yeux pour pouvoir leur dire : avec la visibilité qui est la mienne, j’ai fait ma part pour tenter de sauver ce pays moribond, je n’ai baissé ni les bras ni les yeux, je n’ai pas cédé. En clair, je ne me suis pas soumis à la Doxa (opinion dominante, NDLR), j’ai résisté. A ton tour, maintenant !
Après les élections présidentielles, vos auditeurs sont-ils toujours autant réceptifs aux messages que vous leur partagez ?
Je le crois, car le réel donne malheureusement chaque jour raison à notre famille de pensée. Bien sûr, les audiences actuelles (sauf exceptions notables, comme les passages télé de Marion) sont moindres que les 330.000 vues d’André Bercoff ou les 275.000 des Flics avec Zemmour pendant la présidentielle. Pour autant, les milliers de commentaires sous certaines de mes vidéos témoignent de l’intérêt constant de nos abonnés, lesquels sont de surcroît chaque jour plus nombreux. Pour être précis: 112.400 spectateurs réguliers au 4 octobre, près de 300.000 spectateurs dits « uniques », 2.000 abonnés supplémentaires entre le 7 septembre et le 4 octobre… et tout ça en période non électorale.
Enfin, pour conclure notre sympathique entretien sur un clin d’oeil, je vous informe que nos 70.000 abonnés sont également des aficionados de Livre Noir.
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